Des profondeurs à la lumière
Musique sacrée dans l’Allemagne du 17ème siècle
Entre un Nord marchand, protestant et rigoureux, et un Sud riche, catholique et parfois flamboyant, l’Allemagne (qui n’est pas encore l’Allemagne au XVIIe siècle) est une terre de contrastes. Si l’on connaît Bach, ses disciples et certains de ses prédécesseurs, son rayonnement quasi tout-puissant laisse dans l’ombre toute une école musicale foisonnante.
Ce programme donne à voir de multiples aspects de cette tradition de composition. Les cantates de J.-P Förtsch et S. Ebart témoignent d’une grande puissance expressive, par leur ferveur méditative et leurs élans lyriques. Le violon et la viole de gambe entrent tous les deux en trilogue avec la voix, devenant prépondérants dans la mise en lumière du texte. On retrouve chez D. Buxtehude un goût certain pour la déclamation en musique, la démonstration virtuose ou le feu presque sacré. Héritier des grands Frescobaldi et Schmelzer, il est l’un des plus grands représentants de l’école de clavier allemande, avec un catalogue de près de trois-cents pièces. Il est également un adepte du Stylus Phantasticus, style d’écriture idiomatique et exubérant, importé d’Italie à la fin du XVIe siècle. Pour compléter cette traversée du siècle, le motet de Johann Hermann Schein (qui fut comme Bach Kantor de l’église Saint-Thomas de Leipzig), nous donne un éclairage plus ancien pour comprendre ce qui fera la musique baroque allemande, depuis Michael Praetorius jusqu’à Carl-Philipp Emmanuel Bach.
La grande variété expressive dont témoignent les cantates choisies dans ce programme figure également dans la musique instrumentale, qui donne la part belle aux instruments concertants. La viole de gambe est faite égale au violon et au clavecin dans les très célèbres sonates en trio de Dietrich Buxtehude, mais également dans des œuvres peu connues mais non moins sublimes comme les sonates en trio de J.-P Krieger.
La façon dont dialoguent les instruments à voix égales, le lyrisme sacré et les textes fervents et parfois sensuels ne peuvent laisser indifférents les auditeurs, même dans le monde d’aujourd’hui. Tour à tour réflexive, enfiévrée et fantasmagorique, la musique allemande est à l’image de cet assemblage de royaumes, de principautés et de duchés : mystique et luxuriante.
Romain Bazola, Ténor
Federica Basilico, Violon
Iris Tocabens, Viole de gambe
Claire Meusnier, Clavecin