Petite Histoire Mythologique

Ulysse dans la cantate française du début du XVIIIe siècle

Si l’on connaît la passion du Grand Siècle pour l’Antiquité et ses mythes fondateurs, on sait moins à quel point les figures mythiques et mythologiques des dieux et des héros infusent toute la société française.


Le mythe d’Ulysse, le héros voyageur, est pour les artistes une occasion parfaite de mettre en pratique leurs idées les plus innovantes. Il faut retranscrire les dix ans d’Ulysse à Troie, puis les dix ans du voyage du retour. Il faut montrer les sirènes, les nymphes bonnes ou mauvaises, les sorcières, les îles exotiques. L’aventure, le mystère, le courage, tout y est. Mais surtout, il faut montrer la mer, tout à la fois amie fidèle ou traîtresse, rebelle, indomptable, séjour de l’ennemi mortel d’Ulysse : Neptune.


Dans ce programme, nous observons deux facettes d’Ulysse et de son mythe. Ces deux profils sont peints par deux musiciens, l’une est célèbre (Elisabeth Jacquet de la Guerre), l’autre moins (Jean-Baptiste Morin), mais les deux choisissent le même effectif où les quatre instruments - violon, chant, viole et épinette - se répondent à parts égales.


Les deux compositeurs sont également réunis par leur choix de se soumettre aux règles du même genre, typiquement français, celui de la cantate. Véritable petit « opéra de salon », elle se pratique en privé, sur des instruments appréciés de l'aristocratie (viole de gambe, clavecin ou épinette, traverso et violon), devant un parterre d’amis mais non moins amateurs éclairés. Elisabeth Jacquet de la Guerre est une compositrice de cantates aguerrie, qu’elles soient profanes ou religieuses, les sujets sont toujours traités avec inventivité, faisant la part belle aux lignes de basses et aux parties obligées qu’elle jouait elle-même au clavecin, instrument sur lequel elle était virtuose. Si l’on sait moins de choses de Jean-Baptiste Morin, sa cantate très imagée regorge de couleurs et d’atmosphères novatrices.


Au travers des aventures d’Ulysse, c’est tout l’univers du salon français du début du XVIIIe siècle qui est convoqué ici. Les sonates de J.-F. Rebel et J.-M. Leclair, les pièces de J.-B. Rameau et Antoine Forqueray, tout autant de virtuoses de l’époque, répondent aux ritournelles des deux cantates mêlées, pour ne former qu’une grande histoire, contrastée, haletante et toujours en mouvement, comme la vie du héros elle-même. 

Romain Bazola, Ténor

Federica Basilico, Violon

Iris Tocabens, Viole de gambe

Claire Meusnier, Clavecin